Lancement du Rapport mondial de suivi sur l'EPT 2012 « Jeunes et compétences : l'éducation au travail »

Lancement du Rapport mondial de suivi sur l'EPT 2012 « Jeunes et compétences : l'éducation au travail »

20% des jeunes des pays en développement n'achèvent pas le cursus primaire et se retrouvent sans qualification

La dixième édition du Rapport mondial de suivi sur l'Éducation pour tous, L'éducation au travail, révèle l'urgente nécessité d'investir dans les compétences des jeunes. 200 millions de jeunes de 15 à 24 ans dans les pays en développement n'ont pas achevé l'école primaire et ont besoin d’alternatives à la formation de base pour accéder à l'emploi et la prospérité. Le monde n'a jamais compté autant de jeunes. Un sur huit est au chômage, un sur quatre cantonné dans un emploi qui ne lui permet pas de se hisser au-dessus du seuil de pauvreté. Sous l'effet de la crise économique, qui exerce une forte pression sur les sociétés partout dans le monde, le manque cruel de qualification des jeunes s'avère particulièrement dévastateur.

Malgré des progrès importants dans certaines régions, peu sont en mesure d'atteindre les six objectifs de l'Éducation pour tous (EPT) fixés en 2000, et plusieurs sont même très loin du but. Le Rapport passe au crible les compétences des jeunes, l'un des objectifs de l'EPT les moins étudiés. Il montre qu'il faut aujourd'hui parvenir au moins jusqu'au premier cycle de l'enseignement secondaire pour maîtriser les compétences nécessaires à l'obtention d'un emploi décent. Or, 250 millions d'enfants d'âge scolaire primaire, qu'ils soient scolarisés ou non, ne savent actuellement ni lire ni écrire, et 71 millions d'adolescents se trouvent hors de l'enseignement secondaire, privés des compétences indispensables pour accéder à l'emploi.  

Ce sont les jeunes défavorisés, en milieu urbain ou rural, qui manquent le plus de qualification. En ville, les jeunes n'ont jamais été aussi nombreux, et leur population continue de croître. Dans un cinquième des pays analysés, les jeunes pauvres des zones urbaines sont moins éduqués que ceux des zones rurales. Plus du quart d’entre eux ne gagnent guère plus de 1,25 dollar des Etats-Unis par jour.

La grande majorité des pauvres et des moins éduqués dans le monde vit cependant en zone rurale. Alors que la terre se raréfie et que le climat change, beaucoup de jeunes agriculteurs ne disposent même pas des compétences nécessaires pour parer à ces évolutions et assurer leur subsistance. Les plus démunis sont les femmes, qu'il faudrait former aux métiers commerciaux pour qu'elles trouvent des débouchés non agricoles et n'aient pas à s'exiler en ville pour travailler.

« Nous sommes face à une jeune génération frustrée par l'inadéquation chronique entre les qualifications et l'emploi. La meilleure réponse à la récession économique et au chômage des jeunes consiste à apporter à ces derniers les compétences fondamentales et la formation dont ils ont besoin pour entrer avec confiance dans le monde du travail », a déclaré Irina Bokova, Directrice générale de l'UNESCO. « Beaucoup de jeunes, et de jeunes femmes en particulier, ont besoin d'accéder à des filières de formation alternatives qui les dotent des compétences nécessaires pour gagner dignement leur vie et apporter leur contribution aux  communautés et à la société ».

Investir dans les compétences des jeunes est une stratégie judicieuse pour les pays désireux de stimuler la croissance économique. Selon les estimations du Rapport, chaque dollar dépensé dans l'éducation d'un individu génère durant sa vie active 10 à 15 dollars des Etats-Unis de croissance économique. Ne pas investir dans les qualifications des jeunes, c'est les envoyer grossir les chiffres du chômage dans les pays riches, et dans les pays à faible revenu, les reléguer dans des emplois qui les maintiennent en dessous du seuil de pauvreté. 

Négliger les compétences des jeunes a des répercussions à long terme dans tous les pays. S'appuyant sur les données de l'OCDE, le Rapport estime que 160 millions d'adultes dans les pays développés n'ont pas les qualifications nécessaires pour postuler un emploi ou lire un journal.

Des moyens financiers doivent impérativement être dégagés pour remédier à ce déficit de compétences. Selon les calculs du Rapport mondial de suivi sur l'Éducation pour tous de cette année, en plus des 16 milliards de dollars annuels nécessaires à la réalisation de l'éducation primaire universelle d'ici à 2015, il faudrait 8 milliards de dollars pour rendre l'accès au premier cycle de l'enseignement secondaire universel. Il faut aussi développer plus largement les filières de formation alternatives afin d'atteindre les jeunes restés sur le bord de la route.

 « Certains signes préoccupants suggèrent que l'aide à l'éducation se ralentit au moment même où les enfants et les jeunes en ont le plus besoin », note Pauline Rose, directrice du Rapport. « Les gouvernements et les donateurs doivent trouver l'argent et l'énergie nécessaires pour aider les jeunes les plus exclus à acquérir les compétences nécessaires pour eux-mêmes et pour l'économie de leurs pays. Le secteur privé sera le premier à bénéficier de cette main d'oeuvre qualifiée et doit lui aussi augmenter son soutien financier ».

Le déficit financier pourrait être en partie comblé par une réaffectation de l'aide. 3,1 milliards de dollars d'aide à l'éducation postsecondaire ne parviennent jamais aux systèmes éducatifs des pays en développement parce qu'ils servent à financer les études des étudiants étrangers dans les pays donateurs. Ces fonds seraient mieux employés s’ils permettaient de former les jeunes défavorisés des pays pauvres : le coût d'une bourse attribuée à un étudiant népalais pour qu'il étudie dans un pays développé donnerait accès à l'enseignement secondaire à 229 élèves dans son pays d'origine.  

Alors que le secteur privé serait l'un des premiers bénéficiaires de ce relèvement des compétences, il ne participe actuellement à l'aide officielle à l'éducation qu'à hauteur de 5 %. Cinq entreprises à elles seules assurent une grande partie de cette aide. Pour autant, ces contributions privées ne sont pas nécessairement le reflet des priorités éducatives gouvernementales, mais plus souvent celui des priorités commerciales des bailleurs. Des sommes colossales sont par exemple allouées à l'enseignement supérieur, alors qu'une minorité d'enfants seulement parvient à ce niveau, la plupart restant privés de compétences de base. Le soutien du secteur des technologies de l’informations (TI ) se porte massivement sur les économies émergentes – Brésil, Inde, Chine –, non sur les pays en développement qui ont pourtant le plus grand besoin de cette aide.

Pour sortir de cette impasse et favoriser le développement des compétences des jeunes, le Rapport formule une série de recommandations :

  1. Il faut offrir des filières alternatives d'acquisition des compétences de base aux 200 millions de jeunes qui en sont dépourvus.
  2. Tous les jeunes devraient bénéficier d'une formation de qualité aux compétences fondamentales pertinentes dans le premier cycle de l'enseignement secondaire.
  3. Le deuxième cycle de l'enseignement secondaire devrait assurer un équilibre entre les compétences professionnelles et techniques, notamment les TI, et des compétences transférables comme la confiance et la capacité à communiquer, indispensables sur le lieu de travail.
  4. Les stratégies de formation devraient viser les désavantagés, notamment les jeunes femmes et les pauvres des zones urbaines et rurales.
  5. Il faut huit milliards de dollars pour permettre à tous les jeunes des pays en développement de fréquenter le premier cycle de l'enseignement secondaire. Les gouvernements, ainsi que les donateurs et le secteur privé, doivent participer à cet effort de financement.

La publication du Rapport 2012 fait suite au lancement, le 26 septembre dernier, de « L'éducation avant tout », une initiative du Secrétaire général des Nations Unies Ban Ki moon. Ce dernier a souligné l'importance de mobiliser l'ensemble des parties prenantes pour surmonter les obstacles à la réalisation d'une « éducation de qualité, pertinente et transformatrice ».

« Nos objectifs communs sont simples », a déclaré le Secrétaire général à cette occasion. « Nous souhaitons que tous les enfants aillent à l'école primaire et progressent vers l’enseignement secondaire et un enseignement supérieur pertinent, ce qui les aidera à réussir dans la vie et à devenir des citoyens du monde engagés et productifs ».

-> Consultez le rapport (PDF)

-> Pour plus d'information